Beau pêcheur
Considérant le grand effondrement, il est de coutume de dire qu’on va dans le mur. Or rien ne se passe qui soit à la hauteur du péril. Sommes-nous incapables de voir ce mur qui se dresse devant nous ? Le clip réalisé par Antoine Quevarec propose une autre représentation de l’emballement climatique qui nous menace. Il nous place cheveux au vent, dans une américaine décapotable qui file vers l’horizon. Pas de mur en vue, mais une onde destructrice visible seulement dans le rétro et qui avance au point que bientôt la Buick et ses occupants ne seront plus que des fantômes.
Les paroles de Beau pêcheur d’Arnaud Le Gouëfflec s’adressent à l’homme au volant, nous autres trop occupés à soigner notre égo et jouir de notre sentiment de puissance. L’homme moderne qui n’entend ni ne sent la déflagration qui bientôt l’engloutira.
BEAU PÊCHEUR d'Arnaud Le Gouëfflec
BEAU PÊCHEUR d'Arnaud Le Gouëfflec
un clip réalisé par Antoine Quevarec (2020 - 6')
Noir et blanc. Nuit. Une voiture roule sur une route dans un décor gagné par l'apocalypse.
Ondes de choc
Ondes de choc
par Antoine Quevarec
Un couple en fuite dans le désert, au volant d'une Buick décapotable de 1959. Autour d'eux, tout semble partir en cendre. Le clip, conçu comme une uchronie, fait autant référence aux univers de Philip.K.Dick et de H.P Lovecraft qu'à l'esthétique des films noirs des années 50.
En discutant du projet avec Arnaud Le Gouëfflec, il nous est apparu que la chanson pouvait être comprise de différentes manières. Soit très littérale, comme un conte racontant l'histoire d'un pêcheur et de son poisson, soit plus métaphorique. L'idée, en transposant la chanson dans cet univers, était d'en ouvrir encore un peu plus les possibilités d'interprétation. S'agit-il d'un conte, du récit d'une séparation, d'une mise en garde ? Le beau pêcheur peut ainsi prendre plusieurs visages, à chacun d'en déterminer les traits.
par Arnaud Le Gouëfflec
La chanson repose sur un bourdon, une note tenue au clavier modulaire qui se développe en texture et crée un drone lancinant : il s'agit d'une chanson flux, qui déroule son texte de façon quasi incantatoire, proche de la psalmodie. Les images sont le reflet de ce flux : un déroulé inexorable, progressif, à la tension croissante, au fur et à mesure que le son lui-même s'épaissit et prend de l'ampleur, jusqu'à l'entrée dramatique des guitares électriques. Le clip suit cette logique, les événements apocalyptiques s'intensifiant autour des deux personnages, jusqu'au climax.
Le texte évoque l'angoisse écologique et la crainte d'une fin du monde inéluctable, transposée à travers la circulation du véhicule dans un paysage en cours de dévastation, où se lit le désastre nucléaire et industriel. La forme du tutoiement qu'adopte le personnage principal de la chanson résonne dans la relation muette du couple, qui se cherche sans jamais se trouver ni trouver le moyen d'articuler un dialogue. La noirceur de l'image est au diapason de celle du son. Le climat est oppressant, linéaire (la route suit le tracé du bourdon) et augmente en intensité, jusqu’au mur de son final, qui rejoint celui de l'abîme qui met fin à la route.
Arnaud Le Gouëfflec
Arnaud Le Gouëfflec
Arnaud Le Gouëfflec, 42 ans, construit une œuvre ramifiée, déclinée à travers chansons et disques, romans, scénarios de bande-dessinée ou autres curiosités. Créateur du label souterrain et mystérieux L’Église de la petite folie, il est aussi un des membres fondateurs du Festival Invisible, rendez-vous brestois des musiciens inclassables. Il co-anime le collectif Le Studio Fantôme.
Antoine Quevarec
Antoine Quevarec
Fasciné par le cinéma de genre et d'animation, Antoine Quevarec sort diplômé de l'ESRA Bretagne en 2014. Réalisant différentes vidéos, principalement dans les domaines de la musique et du théâtre, il croise la route de l’Église de la petite folie en 2016.
Réalisateur touche à tout, il aime mêler différentes techniques, allant de la prise de vue réelle au stop motion, en passant par l'animation 2D. Influencé par la littérature de SF et le cinéma de genre, il crée des univers sombres et métaphoriques où les monstres, tapis au fond de ses personnages, semblent se matérialiser et interagir avec leur environnement.
Quand gronde l'Orage
Quand gronde l'Orage
MUZZART >>> Label souterrain et mystérieux, L’Église de la petite folie a des allures de collectif où tout un chacun peut appuyer le travail de l’autre. On ne s’étonnera donc pas, sur ce nouvel album d’Arnaud Le Gouëfflec, L’Orage, de retrouver entre autres John Trap, Olivier Mellano, Thomas Poli ou encore ooTi et sa voix féminine. Ainsi entouré, le Breton s’aventure dans des eaux rock tantôt tumultueuses, souvent sous-tendues, sans se départir de son poétisme dans le verbe.
LE TÉLÉGRAMME >>> Alternant douces ballades oniriques et tension noise rock, le disque porté par un casting de choix donne à penser, certes, mais aussi et surtout, à s’évader au fil de ces dix titres ciselés avec élégance et précision.
BRETAGNE ACTUELLE >>> L’Orage s’impose comme une pure merveille, comme l’un de ces disques qui démontre l’incroyable inventivité du rock français.
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