D'utilité publique
L’industrie agroalimentaire représente une part imposante du PIB de la Bretagne. Des acteurs puissants s’y sont constitués ces dernières décennies avec d’authentiques success stories mais aussi des pratiques pour le moins discutables, tant sur le plan social qu’environnemental.
Inès Léraud a été l’accoucheuse des vérités longtemps cachées, entre des témoins tétanisés et des industriels roués. Avec une calme résolution, elle a pris le taureau par les cornes. Elle est allée se poser dans un village du Centre Bretagne où elle a patiemment abordé son sujet. Des salariés et des agriculteurs sous pression, des élus locaux à la manœuvre et des managers distillant leur com’. Il a fallu pour les témoins du temps surmonter la peur de perdre son travail ou celle d’avoir des ennuis. Il a fallu de la ruse pour que les failles du système apparaissent au grand jour. Mais elle y est arrivé, à bâtir cette fresque sonore, un édifice de connaissance utile à tout le monde, avec le soutien de citoyens engagés et de France Culture. Un service public pour une utilité publique.
Il était couru d’avance que cette douce obstination provoque l’agacement de ceux qui tirent profit du système. C’est ainsi qu’Inès Léraud doit répondre en justice de ses agissements de journaliste et être elle aussi soumise à des manœuvres d’intimidation. Heureusement, des responsables politiques et le corps des auteurs-journalistes se sont mobilisés contre ces procédures-bâillon. Il faudra cependant rester vigilant.
RENCONTRE AVEC INÈS LÉRAUD (2020 - 10')
RENCONTRE AVEC INÈS LÉRAUD (2020 - 10')
Venue en Bretagne pour quelques mois, Inès Léraud y restera trois ans. Un temps qu'elle a pris pour s'immerger, discuter avec les témoins, gagner leur confiance et voir la parole se libérer sur un sujet tabou en Bretagne : le poids de l'industrie agroalimentaire dans le quotidien des gens.
KuB l'a rencontré lors du Festival Longueurs d'Ondes où elle participait à une table ronde sur les difficultés rencontrées dans de telles enquêtes. Après La fabrique du Silence, Algues vertes, l'histoire interdite, ou encore Journal Breton (trois dossiers disponibles sur KuB), Inès Léraud a fait face à deux procès pour diffamation et autres pressions.
Dans cet entretien, elle revient sur son parcours, du cinéma au journalisme d'investigation et parle de sa méthode de travail, de son approche des témoins et de son lien avec la Bretagne.
Inès Léraud
Inès Léraud
Alors qu'elle est lycéenne, c'est en travaillant comme audio-descriptrice qu’elle découvre le cinéma et s'intéresse au travail du son. Elle étudie un an à la Fémis puis entre à l'École Louis Lumière. Elle y écrit son mémoire de fin d'études sur la question du personnage en documentaire, épaulée par Dominique Cabrera. En 2006, une rencontre avec Jean-Charles Fitoussi l'amène à l'assister sur son long métrage Je ne suis pas morte.
Elle écrit et réalise parallèlement des documentaires diffusés sur France Culture s’axant principalement sur les enjeux de santé publique auxquels elle est sensible, ainsi que des documentaires audiovisuels, notamment pour la chaîne Histoire. Elle étudie la philosophie en auditeur libre à l’EHESS.
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Au risque de la procédure-baillon
Au risque de la procédure-baillon
LA DÉVIATION >>> Passer de journaliste pigiste à héroïne de film, c’est la trajectoire inattendue suivie par Inès Léraud, dont trois années de vie sont portées sur grand écran dans Les Algues vertes, de Pierre Jolivet.
LIBÉRATION >>> Tribune : Intimidations, plaintes, procès… Enquêter sur le secteur agroalimentaire n'est pas sans risque. Un collectif appelle à soutenir la journaliste Inès Léraud, victime de ces pratiques, afin de préserver une liberté d'informer menacée.
EUROPE 1 >>> La journaliste Inès Léraud, membre du média d'investigation française Disclose, raconte les pressions qu'elle subit pour ses enquêtes sur les pratiques de l'industrie agroalimentaire en Bretagne et les algues vertes.
BASTAMAG >>> Inès Léraud a été attaquée en justice par Jean Cheritel après avoir publié sur Bastamag une enquête sur les pratiques managériales et commerciales du groupe Cheritel. Le magazine publie la lettre du collectif Kelaouin adressée au président de la région Loïg Chesnais-Girard.
RADIO BREIZH >>> Le cas Léraud ne serait pas un cas isolé et la puissance économique de l'agroalimentaire en ferait une forteresse auquel les médias ne s'attaquent pas, ou très peu. Olivier Scaglia, journaliste au Télégramme, revient sur la situation de la presse bretonne et la possibilité d'un observatoire régional de la liberté de la presse.
ARRÊT SUR IMAGE >>> Une émission qui revient en profondeur sur les procédures baillons dont Inès Léraud a été victime après la publication de ses différentes enquêtes sur le secteur agro-alimentaire breton. Avec Morgan Large, journaliste à la radio locale bilingue RKB et Philippe Gaillard, ancien rédacteur en chef de la rubrique agricole de Ouest France. On a laissé la parole agricole à la presse agricole spécialisée, où il y a une porosité énorme entre journalisme et communication, abonde Morgan Large. Ce qui explique pour elle que Le monde agricole ne comprend pas qu'on puisse émettre une parole critique envers l'agriculture.
FRANCE 3 BRETAGNE >>> Suite à la mobilisation d'un collectif de journalistes pour défendre la liberté d'informer sur l'agroalimentaire en Bretagne, le Président de la Région a pris des engagements : ne plus soutenir les entreprises ne respectant pas cette liberté fondamentale et la création d'un observatoire régional.
12 octobre 2023 21:33 - Veillon Guilloux Catherine
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