Graine de révolutionnaire

Mael et sa cagette de tomates

C’est l’histoire de Maël, que la réalisatrice Céline Thiou saisit au sortir de l’adolescence, au carrefour de l’existence où il faut choisir sa voie. Entre conformisme social ou rupture, Maël choisit la seconde option. Au lycée professionnel et dans l'entreprise de maraîchage, il se confronte aux réalités mais avance sans fléchir dans la direction qu’il s’est choisie : cultiver sa parcelle en permaculture et militer avec Alternatiba, un mouvement citoyen de sortie du capitalisme.

Le film est émaillé de discussions édifiantes avec des potes sur le confort dont il sera très difficile de se passer, de la nasse que représente la société de consommation. Maël et la révolution est un beau film sur la naissance d’une conscience politique subtile qui se confronte aux autres sans les brusquer.

Une page KuB en partenariat avec le Mois du film documentaire 2023.

mois du documentaire et logo KuB

BANDE-ANNONCE

MAËL ET LA RÉVOLUTION

de Céline Thiou (2022 - 80’)

Retrouvez ici la bande annonce de cette oeuvre (les droits de diffusion sur KuB sont arrivés à échéance).

Rien ne prédisposait Maël, 17 ans, enfant des classes populaires, biberonné aux 24 Heures du Mans à s’engager pour la défense du climat. Au lycée agricole où il prépare un bac pro, il fait face à des jeunes qui ne partagent pas ses convictions. Dans son potager ou en manif, Maël se construit une conscience politique curieuse et critique à la croisée des mondes.

>>> un film produit par Morgane Carriou, Maël Mainguy, pour Les Nouveaux Jours Productions

INTENTION

Rapprocher les mondes

maël dans un champ

par Céline Thiou

Apprenti jardinier à la ferme du Grillon, apprenti militant révolutionnaire, Maël est à un moment décisif de sa vie d'homme. Son engagement s’enracine, sa vie déborde de politique. Sa curiosité, sa résistance à l’autorité, l’autonomie que lui donne sa mobylette lui ont permis de se frotter à un monde différent du sien. En 2022, Maël a passé son bac et a pu voter pour la première fois aux présidentielles, accomplissant simultanément deux rituels d’entrée dans la vie adulte. Il vit à 100 à l’heure, la tête dans le guidon, exalté, hyperactif et déterminé à comprendre les fonctionnements du monde auquel il trépigne de participer pleinement.

Issu d’un milieu populaire, Maël a construit son éducation politique hors du milieu familial. Celle-ci s’est nourrie de l’organisation des manifestations contre la réforme du bac, des retraites,


du réseau qu’il a tissé avec les militants engagés dans d’autres luttes sociales, environnementales, anti-fascistes ou féministes, mais aussi de son rapport émancipé aux adultes.
Il est devenu végétarien dans un milieu où la chasse et le grand prix moto du Mans sont au sommet de l’art de vivre. Chez lui, on ne mange pas bio parce que c’est trop cher. Alors il a demandé à ses parents un petit jardin ouvrier et, pour quelques dizaines d’euros par an, il loue une parcelle et se lance dans la permaculture. Maël comprend un peu plus chaque jour qu’il existe différentes manières de vivre et de penser et il négocie avec les valeurs familiales.

Il en va différemment dans le lycée où il a préparé son bac pro horticole en alternance. Là-bas, il est à première vue impossible de distinguer Maël de ses camarades, issus de la même France périphérique, à un détail près, qu’il a fait disparaître au plus vite dès la rentrée, le A de Anarchie tagué sur son sac à dos, qui lui valait beaucoup trop de questions.

Il ne partage aucune des idées majoritaires et conservatrices qui circulent dans son lycée, qu’elles concernent l’agriculture ou plus largement la vie en société. Ici on n’aime pas les écolos et les idées d’extrême droite se revendiquent sans complexe.

J’ai voulu filmer ce que Maël appelle en riant engrainer ses amis.

Un autre champ dans lequel Maël investit du temps, c’est l’amitié. Ses amis n’ont pas ses préoccupations ni sa culture politique. Les amis habitent Coulaines comme lui. Ils se connaissent tous depuis l’école primaire. Coulaines, c’est la banlieue immédiate du Mans, constituée d’une zone pavillonnaire et d’une cité HLM. Parmi eux, presque tous les garçons sont en CAP, seules les filles poursuivent leurs études en lycée général. Si avec la bande de Coulaines, il s’agit d’abord de profiter du plaisir d’être ensemble en faisant des virées à scooters et mobylette et des pique-niques arrosés, Maël se réjouit quand le débat politique surgit. Il provoque peu la discussion, il laisse venir. Et ils débattent : de la nécessité de l’argent dans les échanges, de la possibilité du partage, des modalités d’un monde qui fonctionnerait différemment.

Il y a dans la vie de Maël une abondance de gens et d’expériences. Il occupe et traverse de nombreux espaces. Sa vie militante brasse des idées aux antipodes de celles qui circulent au centre de formation. J’ai voulu faire progresser la narration du film vers un rapprochement des mondes, appuyer les tentatives de Maël pour rendre plus poreux des milieux et des gens qui, au mieux, s’ignorent.

À cette fin, deux personnages sortent de leur pré carré. Il y a d’abord Hugo, l’unique acolyte de Maël de l’option Horticulture qui est un jeune homme beaucoup moins violent dans ses opinions et ses prises de position que les élèves de l’option Agro-équipement. S’il est loin d’être acquis aux idées écolos de Maël, il est très curieux et jamais fermé à la discussion.

Puis il y a Charles, c’est l’un des protagonistes les plus violents dans son discours, l’un de ceux que Maël a craint à son arrivée. Charles est le seul élève du CFA à m’avoir d’abord refusé son droit à l’image, et puis il a changé d’avis, du tout au tout. Il s’est adouci avec Maël, qui l’écoute débiter des horreurs racistes et sa rhétorique d’extrême droite en glissant à l’oreille d’Hugo : que de la gueule, je suis sûr qu’il pense pas la moitié de ce qu’il dit ! Charles représente un parfait antagoniste au personnage de Maël et l’apprenti qui me semble le mieux à même de s’extraire de la caricature qu’il impose au premier abord : le cancre raciste allergique à l’école et aux Arabes.

BIOGRAPHIE

Céline Thiou

Céline Thiou portrait réalisatrice

Metteure en scène et comédienne de formation, elle réalise son premier film documentaire en 2002. Très vite, elle cadre ses films et elle comprend qu’il faut parfois mettre les mains dans le moteur (du réel) pour en libérer le sens ou simplement avoir une entrée de champ. L’écriture prend alors de plus en plus de place dans sa pratique. Elle réalise une dizaine de films documentaires puis, en 2014, elle réalise son premier court métrage de fiction. En 2016, elle intègre l’atelier scénario de la Fémis.

Filmographie


En avoir ou pas, 52’ – Les Films du Balibari – France 3
Ping-Pong, 26’ – Deuxième ligne Films – France 3
Sales Gosses, 84’ – Les Films du Balibari – France 3 et Public Sénat
Tango à l’Ouest, 52’ – 24 images et France 3
Signer la vie, 53’ – Mitiki et France 3 (primé au festival Filmer le travail)
Des mots plein les mains, 54’ – Mitiki et France 3
Le Joueur de crêpes, 52’ – 24 Images et LM Télévision
Entre Ici et là-bas, 52’ – France 3 et 24 Images
L’Attrape-Temps, 43’ – 24 Images et Adria Films, diffusion Canal 8, mention spéciale du jury aux Écrans du réel

REVUE DU WEB

La révolution en germe

FRANCE 3 RÉGION >>> À l’écart des villes, des grandes écoles et de leurs étudiants bifurqueurs, une autre jeunesse militante pour le climat tente de mettre ses idéaux en actes. Entre le lycée agricole, un contrat d’apprenti chez un maraîcher bio et son potager qu’il chérit plus que tout, Maël grandit, convictions altermondialistes chevillées au corps.

RADIO FRANCE >>> Qui sont les jeunes qui manifestent pour le climat ? Ces manifestations n’arrivent donc pas à mobiliser les classes populaires avec un taux très faible d’enfants d’employés et d’ouvriers. Mais conclure au désintérêt de ces catégories pour l’écologie serait une erreur, précisent les sociologues.

SOCIÉTÉ CONTEMPORAINE >>> Une synthèse sociologique sur la condition environnementale des classes populaires, relativement à celle des classes moyennes et supérieures.

COMMENTAIRES

    CRÉDITS

    réalisation Céline Thiou
    image et son Céline Thiou
    montage Mathieu Bretaud
    musique originale Yurie Hu

    production Morgane Carriou, Maël Mainguy pour Les Nouveaux Jours Productions
    avec la participation de France Télévisions

    avec le soutien de Brouillon d’un rêve de la Scam et du dispositif La Culture avec la Copie Privée, la création de la musique originale de la SACEM, la Région des Pays de la Loire en partenariat avec le CNC de la PROCIREP – Société des Producteurs et de L’ANGOA, du Centre national du cinéma et de l’image animée, de la Fondation Alpes Contrôles

    Artistes cités sur cette page

    Céline Thiou portrait réalisatrice

    Céline Thiou

    KuB vous recommande