Peintre ethnographe

de Marie Halopeau Le Corfec (2022 - 13’)

Peintre, illustrateur, décorateur et céramiste… Quel que soit le médium qu’il utilise, Mathurin Méheut raconte sa Bretagne natale. La mer constitue son terrain d’étude privilégié. À la fin du 19e siècle, à une époque où la science commence tout juste à s’intéresser aux fonds sous-marins, il croque la faune et la flore et s'intéresse aussi aux travailleurs du littoral finistérien, dont les gestes immuables lui inspirent des centaines d’aquarelles. Si Mathurin Méheut flirte avec les mouvements artistiques de son époque, celui des Nabis et de l’Art déco, ou encore de l’Art nouveau, il invente son propre style et esquisse les fondamentaux d’une identité culturelle bretonne.

par Marie Halopeau Le Corfec

Fascinée par les multiples talents de Mathurin Méheut, j’ai voulu me plonger littéralement dans son œuvre pour mettre en lumière la qualité du geste et du regard de cet homme besogneux qui ne sortait jamais sans son carnet de croquis. Véritable reporter d’images à sa façon, il semble avoir eu la prescience de la fragilité de la biodiversité mais aussi le désir de témoigner, de garder une trace des métiers et savoir-faire. Sensible à la transmission et considérant mon métier d'autrice-réalisatrice comme un artisanat d’images et de sons, il m’a semblé naturel de mettre mes pas dans ceux de Mathurin Méheut pour tenter d’en révéler le talent au plus grand nombre.

Fils de menuisier, Mathurin Méheut grandit dans la campagne proche de Lamballe, dans les Côtes d'Armor. Doué pour le dessin, il intègre l'École des beaux-arts de Rennes avant de monter à l'École des arts décoratifs de Paris. Puis, diplôme en poche, il séjourne à la station de biologie marine de Roscoff où travaillent scientifiques et chercheurs. Il croque sur le vif la faune et la flore qu’il observe dans les aquariums du centre de recherches et au milieu des rochers du littoral. Il s'échappe de temps en temps pour rencontrer les pêcheurs, goémoniers, iliens des alentours. Passionné par les formes que prend la vie en milieu naturel, il réalise un ouvrage composé de magnifiques planches dans l’esprit des encyclopédistes : L'étude de la mer. Ces planches sont exposées à Paris, au pavillon de Marsan, en octobre 1913. Le tout-Paris artistique découvre un dessinateur d’exception doublé d’un fin coloriste.

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Marie Halopeau Le Corfec fait des études de cinéma à l’Université de Paris 8, puis l’École de reportage des amandiers et un atelier scénario à la Fémis. Depuis 30 ans, Marie navigue entre des documentaires et des fictions aux problématiques sociétales (la place des femmes dans l’histoire, handicap et famille, infertilité et PMA, fin de vie…) et des documentaires culturels (portraits de comédiens, de cinéastes) avec toujours la même approche : raconter une histoire en images, en sons et en humains...

Investie par ses origines bretonnes et soucieuse de transmission, elle écrit et réalise souvent des portraits d’artistes en lien avec la Bretagne (Max Jacob, Jean Moulin, Mathurin Méheut, Paul Gauguin, Maryvonne Jeanne-Garrault et Jean Pierre Garrault…) et s’attache au patrimoine matériel et immatériel armoricain (Fest Noz une résistance bretonne, Phares sentinelles de la mer d’Iroise, Chants de marin du pays Goëlo, Enclos paroissiaux fierté du Finistère, Le canal de Nantes à Brest, Les oignons roses des Johnnies ). Et c’est aussi en Bretagne, sur l’estuaire du Jaudy, qu’elle tourne son tout premier court métrage hommage à sa mam goz de Trédarzec, village du Trégor où ses pas la ramènent sans cesse.