Prolos !
À Brest en 2010, dans l’onde de choc de la crise financière, quand il faudrait travailler plus pour gagner plus, Les Piqueteros, eux, résistent. Pour ce groupe de comédiens amateurs le changement, c’est maintenant et pas plus tard (deux ans avant la campagne de François Hollande). Ils essaient d’échapper à cette aliénation que sont devenus le travail et le consumérisme à outrance, par le théâtre.
Un travail abrutissant, huit heures par jour. Mais pour quoi ? Pour qui ? Et dans quel but ? Portés par ces questions, leur écœurement et la quête d’une alternative, ils écrivent ensemble, réfléchissent ensemble, avancent et reculent parfois. Leur pièce s’appellera Prolos !
Pour ce collectif, qui croit avant tout à la force du groupe, cette rébellion passe par l’écriture, le jeu sur scène et la démocratie. Ils veulent ne plus en être spectateurs, mais bien des acteurs.
Dans Même pas peur, on découvre qu’il est parfois bien difficile d’atteindre cet idéal, et qu’en écriture, comme en amitié, on se déchire pour mieux reconstruire.
MÊME PAS PEUR
de Françoise Bouard et Régis Blanchard (2010 - 88’)
L’époque est à vanter l’individualisme, présenté à tort ou à raison comme nécessaire à la survie. À contre-courant, Françoise Bouard et Régis Blanchard nous proposent un film sur un groupe engagé dans une œuvre commune avec un souci primordial de démocratie. Ceux-ci veulent créer, de manière collective et dans la plus complète équité, une pièce de théâtre où chacun puisse s’exprimer, bien que n’étant pas professionnels du spectacle.
Le suivi du processus créatif s’est étalé sur plusieurs mois, cherchant à capter les relations d’un groupe de neuf personnes embarquées dans une même histoire. Séance après séance le cheminement de l’écriture et de la pensée, les visions qui évoluent, celles qui n’évoluent pas, saisissant les expressions de chacun face aux mots des autres. Chaque étape est l’occasion de cerner les enjeux inhérents à une construction collective, d’observer les principes de démocratie appliqués à la vie du groupe, de saisir les émotions et les sentiments qui traversent ces relations humaines.
Qui apporte quoi ? Comment prendre en compte la pensée de l’autre ? Est-ce que la démocratie c’est faire en sorte que tout le monde participe à tout, malgré ses difficultés et ses faiblesses ?
>>> un film produit par Anne Luart, Spirale Production
Transcender le quotidien
par Françoise Bouard et Régis Blanchard
Le désir de ce film est né d’un coup de foudre, de la rencontre de personnes qui se servent d’une forme d’expression particulière, le théâtre, pour être parmi les autres, échanger, partager et réfléchir collectivement. Le groupe des Piqueteros a pris corps autour du plaisir de jouer, du désir commun d’agir, de dénoncer, de constater et contester, d’éveiller, de proposer, de questionner. L’amitié est venue souder les liens avec la satisfaction très forte qu’apporte le sentiment d’appartenir à un groupe, une famille et une communauté de pensée. Pourtant, les personnalités et la vie de chacun sont différentes. Suivre leur processus de création ouvre alors à un questionnement tant individuel que collectif. Pour Fabrice, Jeannie, Jean et Lag, l’engagement remplit la majeure partie de leur vie, prenant sur leur vie familiale. Pour les autres, le temps donné à une expérience collective se limite à l’activité de la troupe.
Ils sont malgré tout une dizaine, une fois par semaine, après leur journée de travail, à trouver l’énergie pour travailler ensemble. Ils ne veulent plus être vus comme les chômeurs de service qui parlent de leur douleur. D’ailleurs pour la plupart ils ne sont plus chômeurs. Ils veulent avant tout écrire du théâtre.
Au-delà de la question de l’engagement, l’aventure humaine des Piqueteros interroge les questions fondamentales de notre existence : notre aptitude à vivre en société, notre relation au travail, nos faiblesses et nos lâchetés, notre relation à l’autre, notre éternelle insatisfaction et notre perpétuelle recherche du bonheur.
FRANÇOISE BOUARD ET RÉGIS BLANCHARD
Régis Blanchard et Françoise Bouard sont nés tous deux en Vendée en 1972. En 1995, de retour de deux années passées en Turquie où il était marchand de tapis avec les Kurdes d’Éphèse, Régis rencontre Françoise et son désir de cinéma documentaire. Ils entament une suite de films consacrés à la Turquie et ses enjeux démocratiques, sociaux et culturels, notamment la question kurde : Yürü, Un hiver à Istanbul, Sur la faille, Les couleurs lointaines du bonheur. Depuis 2010, ils s’intéressent aussi à des histoires de vie plus proches en filmant la chronique d'une radio associative donnant la voix aux différences avec Ondes fragiles, des expériences théâtrales participatives hors du commun avec Même pas peur et À sa place, ou à travers leur projet 4 mois 1/2, le regard de jeunes adolescents en prise avec la justice. Ces films ont été diffusés sur des chaînes locales, régionales et nationales, sélectionnés et primés dans de nombreux festivals. Animés par le désir de transmettre le geste documentaire et un engagement social, ils collaborent régulièrement avec l’association Les Passeurs d’images dans le Morbihan, et dans la réalisation de documentaires institutionnels et participatifs.
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