Intégrés

de Jeanne Dressen (2007 - 52’)

Moradores (ceux qui restent) raconte l’histoire de quelques-uns des Portugais qui vivent sur l’île de Groix. En 1965, des ouvriers viennent de la région parisienne pour construire le barrage qui servira à alimenter l’île en eau potable. Parmi eux, cinq frères portugais qui ont fui la dictature de Salazar et la pauvreté qui sévit dans leur pays. Ils rencontreront de jeunes îliennes et ne repartiront jamais. D’autres Portugais sont arrivés ensuite, informés du travail que l’île avait à offrir ; les touristes commençant à affluer, il fallait construire des maisons et les Groisillons étaient davantage pêcheurs que bâtisseurs. Le film interroge leurs conditions d’intégration, eux qui n'étaient ni Français, ni Bretons, ni îliens. Ils nous livrent leurs sentiments et racontent pourquoi aucun d’entre eux ne compte rentrer au Portugal à la retraite. Quel rôle joue l’insularité dans ce fait hors norme ? Les Portugais de Groix sont ceux qui restent, moradores.

>>> un film produit par les Films d’Ilje

par Jeanne Dressen

En 2002-2004, j’ai été journaliste reporter d’images pour la chaîne TV Breizh et je sillonnais, pour ma plus grande joie, les îles du Ponant pour l’émission Le Journal des îles. Un jour, j’ai fait un reportage sur la création d’un collectif d’artisans à Groix. Pour les interviews, l’un des artisans maçons m’a emmenée de chantier en chantier, sur lesquels ne figuraient que des noms portugais. Je n’avais pas encore vu d’étrangers sur les îles bretonnes alors pourquoi y avait-il tellement de Portugais ici ? Après avoir fait un reportage de trois minutes pour mon émission, je me suis dit que tout cela méritait qu’on s’y attarde plus longuement. Je souhaitais comprendre quelles avaient été les conditions de leur intégration. Et d’ailleurs, étaient-ils vraiment intégrés ?

Ainsi, le film donne la parole à Antonio Texeira, l’un des cinq frères pionniers à Groix et marié à une Groisillonne. Avec Moradores, j’ai voulu dresser le portrait de la famille da Silva, lui donner la parole et la faire témoigner sur son quotidien. J'ai voulu comprendre ce qui a permis cette acceptation des étrangers par les locaux, la question religieuse, les mariages mixtes, les savoir-faire apportés par les migrants. Enfin, par le témoignage de ces Portugais qui ne retournent pas au pays passer leurs vieux jours, Moradores aborde aussi la question de l’insularité dont j’ai tenté de rendre compte de la beauté et de la puissance des paysages : l’île comme cocon protecteur et enfermant.

Très tôt cinéphile, Jeanne Dressen étudie à l’université, qu’elle termine diplômée de cinéma anthropologique et documentaire. Elle travaille ensuite dans l’audiovisuel pendant une quinzaine d’années, comme journaliste reporter d’images, principalement pour la chaîne cinéma de Canal +, et comme réalisatrice. À titre personnel, elle réalise deux documentaires : Moradores, pour la télévision, et À ma place, pour le cinéma. Les thématiques qu’elle aborde dans ses films portent toujours sur la question sociale et visent à mettre en lumière les personnes laissées dans l'ombre.

20 MINUTES >>> Rencontre avec Alice et Victor Da Silva, tous deux originaire du Portugal et installés sur l’île de Groix depuis les années 1960. Ils partagent leur vécu de l’accueil chaleureux que leur a réservé le caillou.
LE MONDE >>> L’immigrant n’est pas toujours vu d’un bon œil, du moins par une frange de la population française. Les préjugés ont la peau dure et ont été bâtis tout au long du siècle dernier. L’enjeu de cet épisode de L’Heure du monde est de retracer l’histoire de la perception des migrants par la population.
RFI >>> Entre 1957 et 1974, le Portugal se vide de ses habitants : plus d’un million et demi d’entre eux émigrent pour fuir la misère, la dictature de Salazar et les guerres coloniales à partir de 1961. Plusieurs centaines de milliers d'entre eux partent pour la France, en quête d’une vie meilleure.