Bruce Lee revival
LE PETIT DRAGON
LE PETIT DRAGON
de Bruno Collet (2009 - 8')
Dans une chambre d’adolescent, un Bruce Lee en caoutchouc sort, trente ans après sa fabrication, de sa boîte d’emballage. Surpris, le jouet découvre que son corps de latex a souffert de l’usure du temps et qu’il se désagrège.
Malgré ce handicap, la figurine part à la découverte d’un monde inconnu et hors d’échelle. Ordinateur portable, téléphone cellulaire tout lui semble étrange dans la chambre qu’il explore. Surtout, il découvre qu’il est devenu objet de culte pour l’adolescent qui dort dans la pièce. L’émerveillement est de courte durée. Au détour des étagères, le roi du kung-fu va devoir affronter les objets qui le défient. Trop fier pour s’incliner, le Petit Dragon va se battre même s’il sait pertinemment que son corps fragilisé ne résistera pas à la violence du dernier combat…
>>> un film produit par Jean-François Le Corre, Vivement Lundi !
Culte du corps
Culte du corps
par Bruno Collet
Je suis fasciné par le culte qu'a suscité l’acteur hongkongais Bruce Lee, et qu’il suscite encore, près d'un demi-siècle après sa mort. Certes, il a été le premier asiatique à obtenir un rôle important dans un film hollywoodien, à une époque où le cinéma américain ne laissait que peu de place aux acteurs de couleur. Bien sûr, comme toute légende qui se respecte, il a eu une mort violente et mystérieuse. Mais là où le mythe de James Dean et de Marilyn Monroe s’étiole, il n’y a pas un mois sans que la presse, la pub ou Internet ne fasse référence au roi du kung-fu. Alors pourquoi Bruce Lee, exerce-t-il encore une telle fascination ?
Bruce Lee était un homme plus complexe que le personnage, puissant mais naïf, popularisé par le cinéma. Comédien féru de philosophie, il était aussi réalisateur et professeur de kung-fu. Intéressé par tous les arts martiaux, il les fusionne et invente sa propre technique de combat qu’il théorise dans un livre toujours édité : le Tao du Jeet Kune Do (littéralement, la voie du poing qui intercepte). Cette quête du geste parfait est pour lui primordiale. Pour faire connaître sa discipline, il utilise, à l’instar d’un sportif, son corps comme instrument de promotion et le cinéma comme support médiatique. Et cela fonctionne ! En une décennie, des milliers d’adeptes découvrent le kung-fu, un art martial jusqu’alors préservé dans la confidentialité par des maîtres chinois qui considéraient l’homme occidental indigne de détenir les secrets du combat à mains nues.
En cinq films, l’acteur asiatique, première star populaire orientale, a ringardisé les acteurs hollywoodiens qui imposaient leurs images, leurs modes de vie, leurs styles sur les écrans déjà américanisés. La stature imposante d’un John Wayne paraissait lourdaude au regard de l’énergie dégagée par Lee. Le sex-appeal d’un sur-mâle comme Sean Connery semblait soudain hors sujet pour une génération d’adolescents découvrant un acteur félin au torse parfaitement glabre. Car ce que l’on peut aujourd’hui retenir de la poignée d’œuvres aux chorégraphies impressionnantes, mais aux scénarios anémiques et à la mise en scène approximative, c’est l’exhibition permanente d’un corps impeccablement sculpté. L’expression d’une sensualité homo-érotique dans un cinéma populaire qui raccorde Bruce Lee à un culte du corps masculin très avant-gardiste au début des années 70. La fascination exercée par les films de l’acteur hongkongais n’est-elle pas davantage imputable à son image qu’à sa pratique virtuose des arts martiaux ? Le succès, Bruce Lee ne le doit-il pas autant à la magnificence du corps que propose son jeu profondément narcissique qu’à la rage de vaincre et à la violence contenue récurrentes de la psychologie de tous les personnages qu’il incarne ?
Tout en distillant dans mon scénario des éléments qui balisent tous ses films (immersion du héros dans un univers inconnu, combat pour la justice et surtout contre l’ennemi ancestral : le Japon), j’ai focalisé mon écriture sur deux particularités propres à ce culte qui perdure autour de Bruce Lee : l’importance du corps dans l’édification de sa légende et la profusion des avatars inspirés par son image.
Bruno Collet
Bruno Collet
Né en Bretagne en 1965, Bruno Collet obtient en 1990 le Diplôme National Supérieur d'Arts Plastiques aux Beaux-Arts de Rennes. Il commence alors à travailler comme assistant photographe, puis comme décorateur sur de nombreux films, séries et vidéos en volume animé. En 2001, son premier court métrage, Le Dos au mur, est sélectionné puis primé à la Semaine de la Critique au Festival de Cannes. Cette date marque pour lui le début de sa carrière de réalisateur. Les tournages de séries et de films en stop motion vont alors s’enchaîner. Calypso is Like So, en hommage à l’acteur Robert Mitchum, séduit la chaîne américaine Turner Classic Movie qui lui commande Rest in Peace, une mini-série humoristique mettant en scène les déboires d’un psycho-killer cinéphile.
En 2007, Bruno Collet change de registre et propose avec Le Jour de gloire… une vision onirique de l’horreur des tranchées durant la grande guerre. Le Petit Dragon, renoue avec l’humour en offrant, trente-huit ans après sa disparition, de sympathiques retrouvailles avec Bruce Lee. Son dernier court métrage d’animation, Mémorable, a reçu le Cristal du meilleur court métrage au Festival d'Annecy en 2019.
Bruno Collet travaille actuellement à l’écriture de son premier long-métrage d’animation.
Figure mythique
Figure mythique
CINEMATHEC >>> Interview de Bruno Collet : Le Petit Dragon avait été aussi un grand succès à l’étranger. La fille de Bruce Lee avait beaucoup aimé, mais n’a pas voulu qu’on en fasse un long métrage. C’est elle qui a voulu gérer la distribution, et j’aime l’idée que j’ai été approuvé par la fille de Bruce Lee.
FRANCE INTER >>> Bruce Lee, le héros des sans-grades. Alors qu'il tourne le prémonitoire Jeu de la mort en 1973, Bruce Lee meurt à l'âge de 32 ans à Hong Kong. Il laisse orpheline une population qui reconnaissait en lui un héros.
SLATE >>> Bruce Lee, le dragon sur le grill. Ce n'est pas parce qu'il est parfait qu'on n'a pas le droit d'écorner le mythe.
17 avril 2022 22:41 - catherine Veillon-Guilloux
comme c'est bien ! Et puis tous les êtres imaginaires enfin présent dans la stratosphère ! Vive l'Imagination !
14 août 2021 22:53 - Lev
Plein d'énergie et d'humour, vraiment excellent :)
7 avril 2021 20:16 - Caquant
Excellent, génial : j'ai adoré.