À la rue
Strasbourg, capitale de Noël, les passants font leurs emplettes à la nuit tombée. Johnny est assis par terre sous un ciel constellé d’étoiles électriques. Il fait la manche avant de disparaître sous un pont, pour y passer la nuit. Au petit matin, il nous raconte comment il vit, comment il chemine dans le monde tant qu’il peut encore marcher. Car Johnny a 60 ans et il est vieux.
Dans Rivages, Simone Fluhr nous met en relation directe avec ceux à qui nous préférons tourner le dos, des gens à la rue qui se révèlent ici en clochards célestes.
Johnny, Monique et Jean-Luc sont les naufragés de la société de consommation ; ils sont là, parmi nous, sans solution de repli, exposés au monde, ils nous regardent, bien moins jugeants qu’on ne l’imagine. Ce qui saute à l’esprit ici, c’est leur humanité, l’intensité avec laquelle ils sont en vie, racontant si bien leur vécu et leurs émotions. Des paroles auxquelles nul ne peut être indifférent.
Excentrics, une collection KuB en partenariat avec la Scam
RIVAGES
RIVAGES
de Simone Fluhr (2016 - 74’)
Que peut bien vouloir dire vivre à la rue ? Depuis tant de temps et par tous les temps ?
Ils s’appellent Johnny, Monique, Jean-Luc. Ils comptent parmi les silhouettes anonymes qui hantent nos cités. Et si on prenait le temps de s’arrêter auprès d’eux pour faire connaissance ? Histoire de reconnaître chacun dans sa singularité, d'aller au-delà des clichés qui collent à leur peau et qui nous empêchent de les voir tels qu’ils sont, avec pour chacun ses rêves, ses blessures, ses amours, ses difficultés à traverser le sale temps et partager ainsi notre humanité commune.
>>> un film produit par Dorafilms
Étoile de la SCAM en 2017
Sélection à Traces de vies Clermont-Ferrand 2016
En marge
En marge
par Simone Fluhr
Au travers de ce film, je souhaitais rencontrer des personnes dont la rue est devenue le quotidien. C'est leur vie, souvent ils n’en perçoivent plus la perspective, en marge de ce que notre société considère comme étant la réussite, professionnelle et personnelle.
Cette marge, je l’ai déjà expérimentée au cours de ma vie de travailleur social. Longtemps, j’ai accompagné des personnes souffrant de maladie mentale ou de handicaps et par la suite des personnes en quête de refuge dont les premiers mots appris en français sont y'a pas de place pour vous.
Mon projet a été de chercher à rencontrer ces personnes, de les entendre, de capter ce qui fait leur unicité. J'ai la conviction que nous ne sommes pas séparés, nous faisons partie du même monde. La folie et le handicap ne sont pas aussi éloignés de nous qu’on voudrait le croire. Il suffit d'un accident, vasculaire ou automobile, et c’est l’effondrement. Les exigences de compétitivité pointent cruellement nos fragilités, menaçant de nous faire basculer dans le fossé.
Le regard que j’ai porté sur eux se veut dénué de tout a priori. Sans doute n’est-ce pas un hasard que ces trois-là me retiennent : Jean-Luc, Monique et Johnny, rétifs à entrer dans une case et surtout pas dans celle d’une victime. Il s’agit de personnes profondément abîmées par la vie, qui ont perdu confiance en l’humanité et qui traversent cette Terre, en s’y isolant, en errant, en endurant la rude durée de leur passage. S’abandonnent. Ont abandonné.
Au travers de ce film, il ne s’agit pas rendre les SDF visibles, car il semble que ces dernières années, ils le sont trop devenus : ils sont à tous les coins de rue, près des distributeurs de sous, devant notre boulangerie de quartier, ils envahissent les bancs publics. Ce que je veux montrer, c'est ce que raconte leur corps fourbu, souvent lardé de cicatrices, leur visage strié de rides, leurs mains aux ongles noirs ornés de bagouzes. Je ne veux rien gommer de ce qui est dérangeant mais aussi aller au-delà de ce qui ne peut que nous repousser.
La voie que j’ai empruntée consiste à aller vers leur singularité, en laissant se raconter leur histoire. Les petites histoires éclairent ce qu’ils sont devenus mais aussi ce qui les fait tenir. Aucune n’est dénuée de drames : un deuil indépassable, une mère haineuse, un conjoint violent qui non seulement bat à mort mais abat littéralement tout espoir de se relever. Cependant, ces blessures, chacun les métabolise, les sublime, les transforme de manière singulière. Aucun n’est dénué non plus d’attachements à une certaine idée artistique et éthique de la vie : les dessins pour Jean-Luc, la poésie pour Monique, la liberté incarnée pour Johnny. Au fur et à mesure de ce que j’entends d’eux, se dégage une conscience douloureuse et une vision aigüe d’un monde, le nôtre, tel qu’il tourne (mal) et dont ils seraient les révélateurs.
Simone Fluhr
Simone Fluhr
Après avoir été fille de salle à l’hôpital rural de Masevaux, puis monitrice-éducatrice à l’IMP Saint Joseph de Lutterbach, Simone Fluhr travaille pendant 19 ans au Foyer Jean Cuny à Hirsingue accompagnant des personnes adultes souffrant d’une maladie ou d’un handicap mental. À partir de 1999 et jusqu’en 2012, elle accompagne des demandeurs d’asile au sein de l’association Casas à Strasbourg tout en développant son activité dans le cinéma documentaire tant dans l’écriture (Jours d’exil, 2001) que dans l’assistanat (Un travail de fourmi, 1998, André Weckmann, une poignée d’orties, 2003, Une saison sans faim, 2005, La première séance, 2009). Elle co-réalise Dear Ademir en 1998, La casa à la rue en 2006, À cœur ouvert en 2008, Les éclaireurs en 2011, La petite étincelle en 2014. En 2016, elle signe Rivages qui est récompensé par une Étoile de la Scam. En 2020, son film L’homme ce vieil animal malade est sélectionné au FID à Marseille.
Elle est aussi l’auteure du livre Mon pays n’est pas sûr (Editions Scribest) sorti en 2011 parallèlement au film Les éclaireurs.
Sans-abris : gérer la crise
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OUEST-FRANCE >>> Alors que la Fondation Abbé Pierre publie son rapport annuel sur le mal-logement, Jean-Luc Mélenchon dévoilera aujourd’hui son plan logement et rejoint la liste des personnalités politiques à promettre un objectif zéro sans abris. Décryptage avec plusieurs associations d’aide aux personnes sans domicile, qui témoignent du décalage entre les discours politiques et la réalité du terrain.
MAKESENSE >>> Dix chiffres pour comprendre le sans-abrisme en France
19 juin 2022 19:02 - Toublanc Gérard
Merci beaucoup pour ce film.. Quels beaux exemples d'humanité. Merci de les avoir regardés, écoutés, de leur avoir laissé la parole... et de nous permettre de dépasser d'éventuels préjugés, de devenir nous-mêmes plus humains.
20 mars 2022 21:43 - Svea
Bonjour! Je viens de voir ce très beau film, merci pour ces touchants portraits. Je voulais juste vous informer qu’il y a quelques petites erreurs de traduction de l’allemand, c’est dommage; si vous voulez vous pouvez m’écrire.