Sortie de secours
05/03/2025
Vertige est un filet de mots qui se dévident à l’écran, avec hésitations et repentirs, une lecture donc, dans laquelle le cinéma fait irruption. C’est l’histoire d’une femme qui se bat contre la nuit, la laideur du monde, la pluie. Une vie noire d’encre, de larmes et de chagrin, et soudain le ciel qui se déchire, une violente éclaircie.
Vertige est une rêverie ferroviaire, danse des caténaires, images saisies au vol : le ciel, le pays, ses gens. On avance au fil des mots, des lignes, des jours... La vie devant soi, ou la mort.
Le monde regardé comme un champ de signes qui impulsent des émotions et augurent de l’état des choses. Avec ce roman de gare, baigné d'une bande-son aux petits oignons, scandée de tubes de Goldman, Souchon, Gainsbourg… Nicole Zeizig nous embarque dans une histoire sienne et universelle.
Vivre fatigue, aimer rend vivant.
Excentrics, une collection KuB en partenariat avec la Scam
VERTIGE
VERTIGE
de Nicole Zeizig (2018 - 52’)
Vertige c‘est un film qui parle d’amour. À travers le récit d’une rencontre et d'un embrasement amoureux, la narratrice cherche à mettre des mots sur des sensations et des émotions qu’habituellement on garde au plus profond de soi. Il est alors possible de réveiller le souvenir d’autres histoires d’amour. Des histoires qui ont transporté et parfois transformé chacun d’entre nous.
>>> un film produit par Colette Quesson pour À perte de vue, et lauréat de la bourse Brouillon d'un rêve de la SCAM
Transport amoureux
Transport amoureux
par Nicole Zeizig
C’est un film qui parle d’amour, le récit d’une rencontre amoureuse qui bouleverse la narratrice. Une histoire qui arrive dans sa vie quand elle ne croit plus à grand-chose. C’est une histoire qui la ramène dans le monde des vivants après avoir vécu plusieurs deuils. C’est un film sur l’impossibilité de vivre une histoire qui la consume de l’intérieur mais qui lui apprend qu’elle est plus forte que ce qu’elle croyait.
À travers les mots que je pose sur les sentiments qu’habituellement on dissimule, à la manière d’un journal intime en train de s’écrire, je tente de visiter un langage commun. J’ai fait le choix de ne pas raconter cette histoire singulière dans son aspect purement factuel, mais du point de vue des bouleversements intérieurs. J’espère ainsi réveiller le souvenir d’autres histoires d’amour, qui ont transporté et transformé chacun d’entre nous.
J’ai choisi une forme de distanciation dans l’écriture qui s’exprime par un pronom personnel : elle… Elle, c’est moi bien sûr, mais c’est aussi la possibilité des autres elles. J’ai voulu donner le texte à lire et non pas à entendre. Si elle dit Comme s’ils se connaissaient. Par cœurs, on n’entend pas le s à la fin de cœurs. Or là précisément, pour elle, c’est ce s qui traduit la fusion entre les deux individus.
Donner du texte à lire au cinéma est un défi, mais cela permet de rendre visible le chemin de la pensée et de l’écriture, la façon dont on choisit un mot, dont on le change pour exprimer plus subtilement un sentiment. J’ai travaillé avec un dessinateur pour habiller le texte. Il s’agissait de retranscrire dans ces images l’idée du voyage, du mouvement par un défilement rythmé de lignes de fuite : rails ou poteaux électriques vus depuis la fenêtre du train. En support du texte, il y a des images, uniquement des images fixes pour faire contrepoint à l’accélération cardiaque, et suggérer quelque chose du transport amoureux. J’aime faire des images arrêtées qui marquent le mouvement, le voyage, l’entre deux. Des paysages traversés, à peine entrevus, des saisons qui passent, des sensations fugaces, des salles d’attente, des foules, des silhouettes solitaires… J’ai aussi réalisé de nombreuses séquences de photos en rafale depuis la vitre du train ou sur le quai d’une gare, pour créer une sensation de déplacement immobile.
Je me suis servie du dessin et de l’animation pour enrichir ce travail photographique. À partir de prises de vues réelles, le trait interprète librement un autre possible : la pluie dessine sur la vitre du train un chemin de larmes, que le dessin transforme en désert, en océan, en nuage, en vol d’oiseaux… L’animation me permet de distinguer ce qui est vu objectivement, à travers les photos, les messages, les pictogrammes, de ce qui est perçu subjectivement. J’ai voulu éviter une approche illustrative des images, en trouvant un moyen de révéler le sens caché des images telles que la protagoniste les lit.
Les photos accompagnent le texte mais peuvent aussi alerter le spectateur. Elles permettent d’introduire un contrepoint à ce qui est écrit, de faire émerger un doute. J’utilise toute la gamme d’un vocabulaire visuel relatif au danger, très présent dans l’univers de la SNCF. Au son, j’ai recréé l'univers de la SNCF, le vocabulaire sonore propre aux gares, aux salles d'attente et au voyage.
Avant chaque variation importante du récit, j'ai utilisé des extraits de classiques de la chanson française (Goldman, Bashung, Balavoine, Dassin, Daho) comme anticipation d’un état intérieur. Les paroles me servent à suggérer un enfermement, à sonner l’alarme, à amorcer la chute avant même que la rédactrice n’en prenne elle-même conscience. C’est aussi un moyen d’amener le spectateur sur un autre territoire commun. J'ai joué avec les paroles plutôt qu’avec les mélodies elles-mêmes. Les paroles sont scandées, à la manière des annonces en gare, dites par la comédienne Simone Hérault, LA voix de la SNCF. Pour la musique originale, j’avais envie d'un son pop-rock qui casse le côté ton sur ton du voyage intérieur. Je l’ai confiée au compositeur François Villevieille, le compositeur et moitié du duo Elephant.
Nicole Zeizig
Nicole Zeizig
Nicole Zeizig a réalisé deux films : Une petite cantate, en 2001, essai documentaire de 26’, et Vertige, en 2018, un essai documentaire de 52’.
En 2006, elle crée Z’AZIMUT FILMS, une société de production dans laquelle elle produit, jusqu’en 2016, une quarantaine de documentaires d’auteurs. Elle a précédemment été productrice chez .Mille et Une. Films (Rennes).
De 2008 à 2020, elle est présidente d'Ardèche Images, association organisatrice entre autres des États généraux du film documentaire de Lussas. Elle a été responsable des formations à Ardèche images, chargée de communication au Festival international du court métrage de Clermont-Ferrand et à l’Agence du court métrage.
En 2023, elle tourne son troisième film intitulé Les Silencieuses, un documentaire dont la sortie est prévue en 2024.
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