Vue d'ensemble
Il y a près d’un siècle naît Vivian Maier, une migrante ordinaire, gagnant sa vie en tant que nounou dans des familles de New-York puis de Chicago. En 2009, elle meurt dans la pauvreté et l’anonymat, au moment où un jeune homme découvre qu’elle fut aussi une grande photographe. À l’occasion d’une vente publique, il achète pour une bouchée de pain quelques caisses contenant plus de 120 000 photos, ainsi que des pellicules Super 8 et 16 mm.
En 2014 sort le documentaire À la recherche de Vivian Maier et à partir de là, l’histoire s’emballe. En quelques années, l’œuvre de Vivian Maier se dévoile dans toute son ampleur, dans les galeries, les musées et dans d’innombrables publications. Aujourd’hui c’est dans les musées de Pont Aven et de Quimper (du 4 février au 29 mai 2022) que l’on peut voir les magnifiques tirages montrant la vie dans les rues des grandes villes au milieu du 20e siècle, ainsi que les autoportraits qu’elle faisait au fil de ses pérégrinations urbaines.
Regard d’une femme sur ses semblables, revers du grandiloquent rêve américain.
VIVIAN MAIER, LA DURÉE ET L'INSTANT
VIVIAN MAIER, LA DURÉE ET L'INSTANT
par Anne Morin,
commissaire scientifique des expositions Vivian Maier
Deux expositions se font face en Bretagne : le Musée des beaux-arts de Quimper accueille l’œuvre de Vivian Maier axée sur son territoire - New-York et Chicago - alors que le Musée de Pont-Aven aborde sa dimension d'auto-représentation. Les scènes de rue s’inscrivent dans une continuité, une durée presque filmique alors que les autoportraits sont de brèves détonations qui ponctuent le parcours du visiteur.
Deux temporalités s’affrontent entre ces deux expositions, qui ensemble nous donnent une vision complète de l’œuvre de Vivian Maier, comprenant chacune des images inédites.
Ces deux dimensions - la durée et l’instant - n’ont de cesse de dialoguer dans l’œuvre de Vivian Maier. Elle prend réellement corps alors que Vivian Maier vit à Chicago dans la famille des Gensburg entre 1956 et 1967. Cette époque restera le moment le plus heureux de sa vie, un chapitre important aussi du point de vue de son langage visuel car c’est là que s’opèrera le passage entre l’image fixe et l’image mouvement, entre le noir et blanc et la couleur, et que ce basculement se fait par le jeu, probablement ceux inventés avec les trois enfants Gensburg. Le temps s’étire, il devient élastique, l’illusion entre en scène, l’image se fragmente, se répète, tourne sur elle-même ou éclate et déjà le mouvement se met en marche. C’est l’époque où le langage de Vivian Maier accède à sa pleine maturité et continuera à se transformer jusqu’à ce qu’il atteigne son point de non-retour, celui de l’épuisement de la forme.
Dans les rues de New York et Chicago
Dans les rues de New York et Chicago
Découvrir ces images de grandes métropoles américaines, c’est entrer au cœur du cheminement artistique de Vivian Maier : les rues des quartiers populaires de New York et Chicago forment la trame d’un récit qui précise les contours d’un autre monde, un monde dur et tendre aussi, en marge du rêve américain. Vivian Maier nous montre la multitude anonyme et excentrique de la rue, les humeurs et le quotidien des uns et des autres. Ces photographies dévoilent aussi une parfaite maîtrise des codes formels : le souci du cadre, le traitement du vide, les jeux d’ombres et lumières, une stylisation et une géométrisation des formes. Enfin, on retrouve dans ces clichés une section de portraits qui souligne l’importance que la photographe réserve à l’humanité et à la représentation de la classe populaire, à laquelle elle s’identifie.
E(s)t son double
E(s)t son double
C’est dans les autoportraits que Vivian Maier montre la plus grande inventivité formelle. Dans une mise en abyme virtuose et sublimée, elle démultiplie son image et sature l’espace de miroirs et de reflets : est-ce un moyen de réaffirmer son identité, celle d’une femme invisibilisée par son statut social ? Ou alors défie-t-elle les potentiels spectateurs d’atteindre son moi profond en brouillant les pistes ? Son appareil photo devient ainsi à la fois fenêtre et barrière. Toute sa vie Vivian Maier sera le sujet de ses photos, jusque dans les années 1980, quand elle commence à se retirer du monde et disparaît progressivement de la pellicule.
La vie et l’œuvre
La vie et l’œuvre
CulturePrime raconte la vie et l’œuvre de Vivian Maier et permet de découvrir un certain nombre de ses clichés. Édifiant.
Vivian Maier
Vivian Maier
D’origine française et austro-hongroise, Vivian Maier naît en 1926 à New York. Dans sa jeunesse, elle séjourne à plusieurs reprises en France. À 25 ans, elle devient gouvernante d’enfants à New York, puis à Chicago, jusqu’à 1990. Elle meurt dans la pauvreté et la solitude au printemps 2009. Son corpus photographique est découvert à la fin 2007 par John Maloof, agent immobilier qui décèle les qualités de l’artiste restée anonyme toute sa vie. Peu à peu se dévoile une œuvre riche et originale constituée de plus de 120 000 photographies, de films super 8 et 16 mm, d’enregistrements divers et d’une impressionnante quantité de pellicules non développées.
Mary Poppins au Rolleiflex
Mary Poppins au Rolleiflex
LA CROIX >>> En noir et blanc ou en couleur, Vivian Maier (1926-2009), cette fameuse nourrice américaine dont on découvrit l’œuvre photographique exceptionnelle après sa mort, n’a pas fini de fasciner. Pour preuve les files de visiteurs qui se pressent pour découvrir l’exposition que lui a consacré la galerie parisienne Les douches en 2019.
FRANCE INTER >>> Elle est morte dans l'anonymat. Ses photographies, pour la plupart des instantanés de vie quotidienne, des scènes de rue, sont devenues mondialement célèbres après sa mort.
JUST FOCUS >>> Le Musée du Luxembourg met en lumière le travail photographique de Vivian Maier. À travers cette première rétrospective, le public découvre des archives inédites, découvertes en 2007, comme des photographies que l’artiste n’a jamais tirées, des films super 8 jamais montrés, des enregistrements audio. Sous le commissariat de Anne Morin – directrice de diChroma photography, l’exposition révèle à quel point l’œuvre de Vivian Maier est colossale.
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