Leçon de vie
La maladie de Lyme est symptomatique de l’aveuglement dont sont capables les institutions de santé en France. Due à une bactérie transmise par les tiques, cette maladie est responsable de la souffrance d'un grand nombre de malades dont la majorité est rejetée par le système de santé, voire carrément envoyés en psychiatrie.
Axel, 8 ans, fait partie du lot. Par chance, ses parents se mobilisent pour que sa maladie soit reconnue et prise en charge, et plus encore, pour transcender cette épreuve sous forme d’une œuvre. Axel au pays des malades imaginaires est le récit de ce parcours de santé, une autofiction documentaire racontée à hauteur d'enfant. Un film drôle et émouvant, foisonnant de trouvailles formelles, un film pour ne pas perdre espoir, ne pas perdre la boule face à un corps médical à têtes multiples et contradictoires. L'angoisse est sous-jacente, elle déborde par moments, avant d'être refoulée par ce courageux trio qui produit ses propres anticorps à base de dessins et de déguisements.
Axel au pays des malades imaginaires est à la fois une leçon de vie et de cinéma.
AXEL AU PAYS DES MALADES IMAGINAIRES
AXEL AU PAYS DES MALADES IMAGINAIRES
De D. Lorang et D. Beautru (2020 - 52')
Après quatre ans d'errance médicale, un diagnostic est enfin posé : notre fils Axel est atteint de la maladie de Lyme. Entre épidémie silencieuse et pathologie imaginaire, dans le dédale de Lyme se tisse une histoire, celle de notre enfant et de notre quête d'un avenir. Une histoire de chevalier et de super héros dans laquelle Axel n’a pas dit son dernier mot…
>>> un film produit par Vivement Lundi !
D. Lorang & D. Beautru
D. Lorang & D. Beautru
Comment est née l’idée de faire un film sur la maladie de Lyme ?
Lorsque le diagnostic de la maladie de Lyme est tombé sur notre fils Axel, on a pris conscience qu’on venait de perdre quatre années de sa vie à le regarder souffrir sans pouvoir lui apporter des soins adaptés ou même l’apaiser. Notre famille s’est retrouvée projetée dans un monde d’inconnu, de peur et d’incertitudes. Nous avons dû supporter l’errance médicale, les tests de dépistage défaillants, les traitements interdits et non homologués... Et quand on a compris que cette situation d’injustice touchait des dizaines de milliers de malades en France, nous ne pouvions plus continuer à subir sans rien faire. Il nous fallait agir, affronter la maladie d’Axel dans sa globalité, partager notre expérience pour que d’autres s’en préservent.
Filmer Axel lorsqu’il souffre, décider de dévoiler ainsi votre intimité familiale, ce n’est pas une décision anodine...
Nous sommes plutôt des personnes discrètes, pudiques, nous aurions préféré ne jamais avoir besoin de faire un film comme celui-ci, à la première personne du pluriel... Mais on a fini par n’avoir plus rien à perdre et finalement tout à essayer pour réussir à sortir de cette impasse. Faire un film sur les bouleversements que notre famille traversait dès l’annonce de la maladie de Lyme, c’est un des remparts que nous avons dressés pour tenter de nous protéger. En rejouant sa vie sous le costume d’un super héros, Axel acceptait que sa vie soit différente de celles des autres enfants. Certaines accusations ont beaucoup affecté Axel. Il voulait absolument prouver qu’il n’était pas un menteur, que nous n’étions pas fous et qu’il souffrait vraiment, contrairement à ce que prétendaient certains docteurs. Le film nous a tous aidé à exorciser nos peurs, à verbaliser nos émotions et à puiser la force de nous battre ensemble sur la durée.
On découvre la situation controversée de la maladie de Lyme en France à travers votre expérience personnelle, on sent votre colère et en même temps une certaine retenue.
À l’annonce de Lyme dans notre foyer, nous n’avons pas eu d’autre choix que d’accepter sa présence. Les capacités physiques faisant défaut, tous nos rêves se sont réduits à un seul, être en bonne santé. Nous avons ressenti beaucoup de colère lorsque nous avons compris le non-sens médical auquel notre enfant devait faire face. Certains pays annoncent un problème majeur de santé publique, là où la France continue de nier l’existence de la maladie de Lyme au stade chronique et condamne des milliers de personnes à l’errance médicale. Les raisons d’un tel déni restent obscures, certains annoncent l’impuissance inavouable du corps médical devant cette épidémie, d’autres dénoncent des pertes financières trop importantes si l’on venait à indemniser tous les malades. Nous n’avons malheureusement pas la réponse. Nous avons rencontré de nombreux malades de Lyme, entendu des dizaines d’histoires tragiques, des vies mises entre parenthèses pour une durée indéterminée. Aujourd’hui notre rêve est toujours le même et notre regard se tourne vers l’avenir, en espérant que des changements positifs arriveront.
Axel grandit pendant le film, il y a une évolution des personnages, combien de temps a duré le tournage ?
Entre le premier été où nous avons sorti notre caméra et la fin du tournage, trois années se sont écoulées. Nous avions besoin de voir le plus objectivement possible les faits, de nous confronter à la vérité nue de notre vie de famille, brisée par la maladie. Nos premières intentions ont donc été de capter le réel, notre quotidien tel qu’il était au moment précis où Axel allait très mal. Alors que nous faisions face à des déceptions de plus en plus grandes sur la prise en charge de notre fils, notre caméra enregistrait ce qui allait constituer la colonne vertébrale du film. Nous avons étalé les tournages avec Axel sur plusieurs mois pour pouvoir respecter les rythmes de chacun, afin de prendre du plaisir à jouer devant la caméra. Axel a une aisance à se mettre en scène depuis tout petit, il nous a fait beaucoup de propositions pendant l’écriture du film et son petit frère Manoé a voulu y participer aussi en grandissant. C’était une expérience très émouvante à vivre tous ensemble.
Vous utilisez des principes de mise en scène, vous en dévoilez parfois les coulisses, est-ce que c’est une manière de dépasser la réalité ?
L’imaginaire a toujours été notre meilleure arme pour aider notre enfant à surpasser ses souffrances. Dans son lit nous lisons beaucoup de livres, nous inventons des histoires d’animaux, de super héros, de preux chevaliers... S’évader par la fiction, c’est finalement devenu un code entre lui et nous pour dédramatiser les moments difficiles, un moyen comme un autre pour qu’il puisse être heureux malgré son état de santé. Le film s’est en grande partie construit autour de ce principe.
Vous racontez votre histoire à trois voix, comment se sont répartis les rôles ?
Le point de vue d’Axel sur son histoire nous semblait indispensable, c’est d’ailleurs la première voix que nous avons écrite ensemble, celle qui a guidé la construction du récit. Quand nous lui avons proposé de raconter son histoire, Axel a tout de suite accepté. Lui qui vivait si mal les accusations de certains médecins le traitant de menteur, il avait devant lui l’occasion rêvée pour exprimer et partager ses sentiments. Dans le film, Axel parle avec sincérité de son quotidien de malade de Lyme et expose sa propre version des faits avec une lucidité déconcertante. Nos voix de parents réexpliquent à Axel ce que nous comprenons au fil de nos rencontres, de nos rendez-vous médicaux, la réalité est alors revisitée pour qu’il puise l’appréhender à hauteur d’enfant. Parfois nos trois voix s’entremêlent, se répondent, nous voulions qu’elles soient dynamiques et chaleureuses, que la tendresse de nos relations puisse se ressentir simplement, sans artifices. Tout au long du film nous dévoilons notre cheminement intime jusqu’à l’espoir retrouvé
Comment Axel a réagi en voyant le film ?
Nous avons écrit, tourné et monté la majeure partie du film à la maison. Axel a suivi avec une grande attention l’évolution du travail, il a aimé observer les différents trucages et y participer. Il s’est reconnu dans le film et a aussi reconnu son histoire, c’était primordial pour nous. Lorsqu’ Axel est venu visiter les locaux de France Télévisions où nous avons réalisé la post production du film, il était étonné de voir son visage sur tant d’écrans dans plusieurs salles en même temps. Il a pris conscience que beaucoup de personnes travaillaient sur ce film et que beaucoup d’autres allaient le regarder. Il nous a serré dans ses bras un long moment. Nous qui lui avions promis de montrer au monde entier qu’il n’était pas un menteur, nous avions tenu parole. Il nous a confié que jouer dans ce film allait lui manquer. Ça a été un vrai exutoire pour nous tous. Nous qui sommes devenus les personnages d’une épopée incroyable, prêts à affronter les pires créatures imaginables retournons aujourd’hui à notre quotidien ordinaire... Mais nous continuons à imaginer d’autres histoires ensemble, à dessiner des personnages, à créer des mondes, nos aventures cinématographiques se poursuivront peut-être en famille dans d’autres contrées !
Dorothée Lorang
Dorothée Lorang
Dorothée Lorang est diplômée de l’École nationale des beaux-arts de Nantes. Elle y mène une réflexion sur le travail d’écriture lié étroitement à une recherche autour de l’image en mouvement. Elle questionne à travers cette recherche cinématographique la relation à l’Autre, l’enfermement, le rapport interne et externe des choses, la relation entre le réel et la fiction. Pendant son cursus aux beaux-arts, Dorothée Lorang participe au projet de résidence Hashiru Kanazawa au Japon. Elle expose alors dans différents lieux culturels français et japonais. Cette expérience l’amène à réaliser avec David Beautru City Lights, leur premier documentaire en autoproduction, sur la jeune génération japonaise au Japon.
David Beautru
David Beautru
Diplômé de l’École Nationale des beaux-arts de Nantes et d’un BTS communication visuelle à Léonard de Vinci, David Beautru exploite l’image et le cinéma comme médium d’expérimentation. Sa démarche artistique explore le corps ainsi que sa condition dans le temps et l’espace. Depuis 2008, David Beautru travaille comme monteur pour l’artiste nantais Pierrick Sorin et comme réalisateur sur différents projets produits par MachineMachine Films. Il travaille en collaboration avec la réalisatrice Dorothée Lorang sur des documentaires, des courts-métrages et des vidéo-lives. Entre documentaire et fiction expérimentale, ils cherchent au Japon des éléments de réponse sur la société contemporaine.
La maladie de Lyme sous silence
La maladie de Lyme sous silence
TY FILMS >>> Un café avec avec Dorothée Lorang et David Beautru.
FRANCE 3 >>> La forme du film permet à tous, petits et grands, de comprendre les symptômes de la maladie, l'absurdité des situations médicales qu'elle crée et le désarroi des familles. Axel au Pays des Malades Imaginaires pose sans détour la question de santé publique que représente la maladie de Lyme en France.
OUEST-FRANCE >>> Lyme est un mal silencieux, peu reconnu, et pour certains encore, un pays de chimères et de malades imaginaires. Ce témoignage très personnel veut raconter pour faire bouger les lignes.
SCIENCES ET AVENIR >>> Dans un essai, le médecin Éric Caumes dénonce ce qu'il estime être un surdiagnostic massif de ses confrères qui, paradoxalement, égarerait des malades bien réels de cette infection bactérienne transmise par les tiques. Il affirme qu'environ 90 % des patients venant consulter pour une suspicion de Lyme ne sont finalement pas touchés par cette maladie.
20 octobre 2021 13:33 - Cariou
Très émouvant
Bravo á tous et merci de parler de la maladie et l'errance médicale
14 octobre 2021 21:49 - Monia
Un reportage très émouvant, j'imagine tout ce que vous avez dû traverser ... j'espère que l'amélioration continue pour lui et bravo à vous pour ce film témoignage . monia
12 octobre 2021 22:44 - Matt
il est tout mignon ce petit, courage à lui et aux parents et bravo pour ce film inventif