La confession

enfant débardeur bleu casque oreilles - Flee

Flee pour fuir, s’exiler, échapper à son passé, c’est de cela que parle le film magistral du réalisateur danois Jonas Poher Rasmussen coproduit par Vivement Lundi !

Flee raconte l’histoire d’Amin, un jeune homme né à Kaboul à la fin des années 60 et qui fuit son pays à la suite de l’invasion soviétique en 80. Il se livre à mi-voix, sous le regard et la caméra de son meilleur ami, à Copenhague. Des vagues de réminiscences déferlent à l’écran, par des dessins bouleversants de sensibilité alors que les personnages ne laissent pratiquement rien apparaître de leur trouble. Ce film d'animation alterne deux styles picturaux dans lesquels s’insèrent des archives filmées à Kaboul, Moscou et en Estonie dans les années 80-90, l’envers des actus, une impression de réalité crue qui fait irruption dans le calme chic de la cité danoise.

Œuvre d’art universelle, Flee raconte la fuite des hommes dont le pays d’origine est devenu invivable, il raconte le sort des migrants à la merci des trafiquants et des policiers corrompus. En cela il est éminemment actuel tout en étant intemporel.

Flee a reçu de nombreuses récompenses prestigieuses :

Oscars 2022 : triple nomination pour le Meilleur long métrage international, le Meilleur documentaire et le Meilleur film d’animation.

Golden Globes 2022 : nommé pour le prix du Meilleur film d’animation.

Prix du cinéma européen 2021 : prix du Meilleur film d’animation et prix du Meilleur film documentaire.

Festival international du film d’animation d’Annecy 2021 : Cristal du long métrage, Prix Fondation Gan à la diffusion et prix de la Meilleure musique originale.

Une page KuB en coédition avec Cinécran

ENTRETIEN

La fabuleuse aventure de Flee

Dans le cadre des 20e Rencontres du cinéma européen organisées par Cinécran, Jean-François Le Corre (Vivement Lundi !) raconte l’aventure Flee.

BANDE-ANNONCE

FLEE

de Jonas Poher Rasmussen (2020 - 85')

Flee relate l’histoire d’Amin, arrivé seul en Europe à l’âge de 16 ans après avoir fui les Moudjahidines en Afghanistan pendant près de cinq ans, forcé par les trafiquants d’êtres humains de taire la véritable histoire de sa fuite. Aujourd’hui, à 35 ans, il finit son doctorat dans l’une des plus prestigieuses universités américaines et va se marier avec son partenaire danois, qui souhaiterait déménager à la campagne. Mais Amin ne se sent pas prêt pour cette nouvelle étape. Souhaitant affronter son passé, il décide de se confier à son meilleur ami Jonas en lui racontant pour la toute première fois sa fuite tragique. L’histoire d’une existence stoppée nette dès son commencement et en même temps de la découverte d’une sexualité émergente dangereuse.

>>> un film coproduit par Monica Hellström, Signe Byrge Sorensen (Final Cut for Real), Charlotte de la Gournerie (Sun Creature), Jean-François Le Corre, Mathieu Courtois (Vivement Lundi !), Charlotte Most (Most Film) et Maria Ekerhod (Mer Film)

INTENTION

D'une fuite à l'autre

femme et enfant devant des portes qui s'ouvrent - Flee

par Jonas Poher Rasmussen

J’ai grandi dans une famille très libérale où l’on m'a toujours appris à être respectueux, ouvert d'esprit et curieux des personnes autour de moi, en dépit de leur passé, de leurs convictions politiques et de ce qu’elles pouvaient défendre. Ce qui m’intéresse le plus dans la réalisation de documentaires c’est de rencontrer des gens de tout horizon. Mon but est de bâtir avec eux une relation honnête dans un environnement de confiance pour obtenir l’accès à leurs histoires les plus intimes. J’essaye de comprendre leurs nuances et leurs complexités, leurs vulnérabilités ou leurs côtés plus sombres et même parfois les facettes les plus inhumaines de leurs vies.

Je cherche toujours de nouvelles manières et de nouvelles approches pour raconter ces histoires. Je recherche comment déformer le format du film pour qu’il corresponde à l’histoire racontée. J’ai déjà travaillé des reconstitutions théâtrales, des hybrides fiction/documentaire. Avec Flee, j’ajoute l’animation à mon répertoire. Je vise à créer un récit captivant afin de donner aux témoignages que j'ai recueilli la tribune qu’ils méritent.


Venant d’une famille juive, le sujet de la fuite et de l’exil est très important pour moi. Mes ancêtres ont fui la Russie au début du 20e siècle pour éviter les persécutions et les massacres. Comme Amin, le personnage du film, ils ont navigué de la mer Baltique au Danemark. C’est là que ma grand-mère est née, dans un hôtel proche de la gare de ma ville, Copenhague. Sa famille (ma famille), a demandé asile mais cela leur a été refusé. Ils ont été forcés de partir à nouveau, cette fois en Allemagne. Lorsque ma grand-mère était à l’école primaire à Berlin, elle était forcée de porter l’étoile jaune devant ses camarades de classe. Rapidement, elle a dû fuir encore, cette fois pour l’Angleterre. Cela est arrivé il y a presque un siècle, mais son histoire de fuite perpétuelle plane toujours au-dessus de ma famille.

J’avais 15 ans, quand Amin est arrivé dans ma petite ville Danoise. Il est arrivé d’Afghanistan par ses propres moyens et vivait dans une famille d’accueil, à l’angle de la rue où je vivais. Nous nous retrouvions tous les matins à l’arrêt de bus, sur le chemin de l’école. Petit à petit, nous sommes devenus des amis proches. C’était il y a 25 ans. Pendant tout ce temps, il ne m’a jamais raconté comment et pourquoi il était venu au Danemark. En fait, il ne l’a jamais dit à personne.

Comme j’étais adolescent, je ne l’ai jamais questionné sur son passé. Cela ne me concernait pas vraiment. J’aimais juste avoir un copain de gym. J’aimais avoir quelqu’un à qui je pouvais parler. Cependant, au fil des ans, j’ai commencé à entendre des rumeurs sur ce qu’il avait traversé avant qu’il arrive à mon arrêt de bus.

Pendant au moins la moitié de sa vie, Amin a évité de raconter son histoire. Imaginez à quel point j’étais excité quand il a accepté de s’ouvrir à moi. Il était prêt à tout me dire. À quel point nos vies étaient différentes… et similaires ! Nous avons à peu près le même âge, nous écoutons la même musique, regardons les mêmes films et apprécions les mêmes sports. Il adorait jouer au volley à Kaboul, pendant que j’adorais jouer au football au Danemark. Puis, sa vie a changé radicalement. Il a passé cinq ans à fuir, avant d’enfin arriver, seul, dans ma ville.

Faire Flee m’a permis de mieux comprendre les conséquences dramatiques de devoir quitter sa maison, surtout pour un enfant, comme Amin, comme ma grand-mère. J’ai commencé à comprendre les difficultés que rencontrent les enfants comme eux, quand leur passé et leur présent sont déconnectés. J’ai compris pourquoi ils avaient tendance à se projeter dans l’avenir, tout en gardant à distance les gens autour d’eux. J’ai compris ce que c’était d’avoir un secret si profond que tu ne peux partager avec personne, mais qui sera toujours un poids silencieux dans les relations et la vie de cette personne.

Quant à Amin, j’ai réalisé que ce sentiment d’exil était toujours présent au fond de lui, même après toutes ces années. Je crois que c’est parce qu’il n’a jamais eu l’opportunité de se confronter à son passé et partager son histoire, l’histoire de Flee.

BIOGRAPHIE

Jonas Poher Rasmussen

Réalisateur Jonas Poher Rasmussen - Flee

Jonas Poher Rasmussen est danois. Né en 1981, il commence sa carrière en tant que réalisateur de films et documentaires radio à la Danish Public Radio et débute en 2006 avec le film documentaire salué par la critique Something about Halfdan, suivi d’une série de documentaires radio. Il commence à réaliser des films de fiction en 2008 après avoir rejoint le collectif de cinéma danois Super16 chez Nordisk Film, où il écrit et réalise trois courts métrages de fiction. Son premier long métrage Searching for Bill un mélange de documentaire et de fiction remporte des prix aux festivals internationaux de documentaires CPH:DOX et festival DocAviv. En novembre 2015, son documentaire What he did, remporte le prestigieux Fipresci au Festival de Thessalonique.

REVUE DU WEB

Comprendre la situation afghane

LE FIGARO >>> Initialement, Amin ne souhaitait pas parler de ce qu'il avait vécu, craignant pour son statut de demandeur d'asile mais aussi d'être perçu comme une victime. C'est en 2013 que le réalisateur, spécialisé dans les documentaires pour la radio, a eu l'idée de traduire les entretiens avec son ami sur grand écran, sous forme de film d'animation.

FRANCE CULTURE >>> Il s'est mis dans la peau d'un réfugié et a suivi les routes dangereuses de l'Afghanistan aux îles grecques : Matthieu Aikins, grand reporter en Afghanistan et au Moyen-Orient, auteur de l'enquête en immersion Les humbles ne craignent pas l'eau.

L’EXPRESS >>> Dans un quartier historique de Boston, Israr et Sayeda cherchent toujours leurs marques plusieurs mois après avoir fui l'Afghanistan : il faut trouver un travail, manier l'anglais, accueillir prochainement un premier enfant, mais aussi garantir leur avenir encore incertain aux États-Unis.

LE MONDE >>> Afghanistan : l’ONU demande cinq milliards de dollars d’aide pour assurer un avenir au pays. C’est le plus important montant jamais réclamé par l’institution pour venir en aide à un seul pays, menacé de catastrophe humanitaire depuis le départ de l’armée américaine.

COMMENTAIRES

  • 1 septembre 2022 10:28 - Orhan

    Merci. Tres documenté comme d habitude Kub.
    Merci

CRÉDITS

voix françaises Kyan Khojandi, Damien Bonnard

réalisation Jonas Poher Rasmussen

écriture Jonas Poher Rasmussen, Amin
montage Janus Billeskov Jansen

musique Uno Helmersson

ENTRETIEN
avec
Jean-François Le Corre

entretien Bérangère Portalier

image et son Kilian Jarno

montage Morgane Gonzalez

moyens techniques KuB

coproduction Final Cut for Real, Sun Creature, Vivement Lundi ! Most Film, Mer Film
avec la participation de RYOT Films, Vice Studios

avec le soutien de ARTE Fance, Copenhagen Film Fund

Artistes cités sur cette page

Réalisateur Jonas Poher Rasmussen - Flee

Jonas Poher Rasmussen

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