Postpartum
12/12/2024
Dans L’Ombre des mères, la réalisatrice Murielle Labrosse nous fait part des difficultés que peuvent rencontrer certaines femmes à s’adapter sereinement à leur nouveau rôle de mère. Avec calme et courage, elle explore cet empêchement à ressentir la joie d'avoir donné la vie. Au lieu de se pâmer devant le poupon merveilleux, elles se demandent si ce corps sorti du corps est un accomplissement ou une défaite. La question circule de femme en femme, avec pertinence et compassion, pour ces mères en eau trouble, hypersensibles, craignant de ne pas savoir répondre aux besoins de cet être si étrange qu’est un bébé, totalement dépendant des humains qui l’entourent, et de sa maman en premier lieu.
Une page KuB en partenariat avec le Mois du documentaire 2023
L'OMBRE DES MÈRES
L'OMBRE DES MÈRES
de Murielle Labrosse (2022 - 50’)
Une femme voulait s’arrondir et fondre aussi souvent que la lune, mais elle n’est pas la femme lune qu’elle attendait. La naissance d'un premier enfant la plonge dans la tourmente. Au fil des jours, l’illusion d’une maternité parfaite cède la place à la tragédie. Son récit, ponctué de témoignages d'autres femmes, évoque l’ambivalence maternelle et nous révèle une part plus sombre de la maternité.
>>> un film produit par Gilles Padovani pour .Mille et une. Films
Sortir du schéma maternel classique
Sortir du schéma maternel classique
par Murielle Labrosse
Ce film documentaire répond à mon désir ancien d'aborder un tabou, celui d’une maternité qui ne se passe pas dans la joie et l’épanouissement, et d’évoquer une relation mère-enfant tourmentée où s’exprime l’ambivalence des sentiments. Ma mère comme ma grand-mère étaient toutes deux dans une difficulté de ce lien. Leur fragilité ne leur a pas permis d’accueillir un enfant avec sérénité.
Lorsque je me suis lancée dans ce projet, il s’agissait pour moi de raconter un vécu, de partager quelque chose que je connaissais. Mais il n’est pas facile de dépeindre une mère loin de l’image idéale d’une mère aimante et dévouée. J’ai conscience de toucher à une part intime chez chacun de mes interlocuteurs. En questionnant l’amour maternel, je fais vaciller des certitudes. Selon la sensibilité des uns et des autres, je provoque soit le silence, soit de vives réactions.
Traiter du thème de la maternité, c’est également se confronter à des siècles d’histoire et à des icônes. Au siècle des Lumières, deux mythes apparaissent, celui de la nature féminine et celui de l’amour maternel. Médecins et philosophes ont été nombreux à prendre la plume pour définir cette nature féminine et déterminer les comportements des mères à l’égard de leurs enfants. Progressivement, l’enfant est devenu un objet d’amour, et au fil des siècles le cocon familial s’est organisé autour de lui. En avançant sur le projet, j’ai constaté que la femme est souvent malmenée dans ce moment singulier de la maternité. Elle doit se conformer à l’icône de la mère comblée et épanouie et laisser de côté ce qu’elle ressent au plus profond d’elle-même. Sortir du schéma habituel peut faire ressentir honte et culpabilité.
Parler du lien mère-bébé, c’est évoquer l’étrangeté qu’une mère peut éprouver face à son nouveau-né. C’est aussi aborder le sacrifice d’une partie de sa liberté pour se consacrer à l’enfant. Une mère peut être traversée par des élans contradictoires à l’égard de son enfant. Les sentiments maternels sont ambivalents, complexes, imprévisibles et surtout ils ne sont pas figés et ne répondent à aucune règle présupposée.
Pour donner une place à la figure de la mère dans le film, j’ai imaginé une figure fictive, un personnage de conte, celle de la Femme Lune, porte-parole des multiples témoignages tirés de l’ouvrage Tremblement de mères [recueil de témoignages rassemblées par l’association Maman Blues, ndlr]. Je me suis ainsi inspirée de leurs paroles pour créer un personnage imaginaire, symbole d’une maternité tourmentée. Avec ce dispositif, j’ai souhaité faire un portrait de mère loin des conventions, pour rendre visibles des émotions ressenties par des femmes mais souvent réfrénées. En mêlant les témoignages des mères, de la Femme Lune et la parole de professionnelles qui viennent porter un éclairage documenté et analytique sur la question, j’ai souhaité questionner ce lien mère-enfant et également aborder de façon plus large certains aspects de la maternité sur un versant à la fois psychologique, historique et sociétal.
Murielle Labrosse
Murielle Labrosse
Murielle Labrosse est réalisatrice. Elle intègre l’atelier documentaire de la Fémis en 2010 pour son premier film Sans gravité. Pour le cinéma et la télévision, elle travaille aussi comme directrice de casting et repéreuse. Elle aime s’impliquer dans des dispositifs d’éducation à l’image. Elle a mené un projet de correspondances filmées dans une école primaire. Elle a également eu une expérience de journaliste reporter d'images pendant quelques années. Photographe, lauréate de plusieurs concours, elle est membre fondateur du collectif Déclics et d’éclats.
Filmographie
2022 L’Ombre des mères, .Mille et une. Films
2020 Lettres filmées, Périphérie Montreuil
2015 Yvette l’hirondelle, Ty Films
2015 Sans gravité, autoproduction
Maman blues
Maman blues
OUEST FRANCE >>> Quand devenir mère est une souffrance intense. Dans son documentaire, Murielle Labrosse livre un témoignage puissant, entrecoupé de prises de paroles de spécialistes sur la dépression postnatale ou psychose puerpérale.
LIBÉRATION >>> Une sociologue est allée à la rencontre de ces femmes qui ont découvert après coup qu’elles n’étaient pas faites pour avoir des enfants. Une parole qui semble inaudible quatre décennies après la révolution féministe. L’enquête fait polémique.
FRANCE INTER >>> Ce podcast se penche sur les différentes formes de baby blues, de la déprime passagère à la dépression qui s’installe durablement, en passant par le déni de grossesse, ou l’anxiété ressentie par la femme enceinte, et son entourage.
6 juillet 2024 22:52 - Maguy T
Le traitement du sujet exploite les ombres et le flou commre motifs pour dire le secret des mères amères. Il y a aussi les barreaux des lits cages, des fenêtres prisons, des surcadrages du ressassement claustrophobe. Les témoignages recueillis sont forts , épaulés par des analyses libératrices de femmes psy. Merci à Murielle Labrosse .
16 mars 2024 13:27 - Sidonie B
Le film évoque justement l'impossibilité d'apporter toute l'attention , le soin nécessaire au bon développement de l'enfant . si l'enfant a besoin d'amour faut-il encore pouvoir lui apporter c'est tout le questionnement du film. Il a aussi le mérite de faire entendre une souffrance maternelle souvent inaudible voire niée. Le commentaire ci -dessus en est l'illustration parfaite je pense.
3 janvier 2024 15:27 - Anne Boissel
Chiant , alors qu'un enfant a juste besoin d'amour , pas de ces introspections larmoyantes !
Désolée !