Baragouin
Premiers mots est un documentaire sonore de Glenn Besnard qui nous fait entrer dans l’intimité de la bulle familiale. Au centre de son attention, sa fille Eléa, qui vit cet âge merveilleux du babillage quand, du charabia du bébé émergent les premiers mots de l’enfant. Le père est tout ouïe sous son casque, récoltant ces pépites sonores tout en provoquant subtilement sa fille. C’est délicat, et parfois craquant.
Découvrir ce que l'on peut articuler avec sa voix, ce que ça provoque de complicité avec les grands, c’est commencer à être acteur de sa vie. Eléa semble avoir saisi le principe, il lui faut encore acquérir du vocabulaire. L’intention y est, il manque les mots, quoique dans ses vocalises, il semble bien qu’on puisse distinguer Papa, bébé, l’eau, tateau… Des syllabes qu’Eléa prononce, menant ses parents au bord de l’extase.
Dans la dernière partie de Premiers mots, la pluie tambourine sur le toit et le vent siffle dans les interstices, nous préparant à un final irréel où l’on décolle littéralement dans une autre dimension, quand les mots nous entraînent dans un monde imaginaire.
PREMIERS MOTS
PREMIERS MOTS
de Glenn Besnard et Christine Robert (2019 – 28')
Glenn Besnard est ingénieur du son. Lorsque sa fille naît, il décide d’enregistrer les sons qu’elle émet. La découverte d’Un petit chariot pour la Grande Ourse de Yann Paranthoën le décide à en faire une création sonore rendant compte de l’apprentissage du langage d’Eléa.
Hommage au tailleur de son
Hommage au tailleur de son
par Glenn Besnard
En 1967, Yann Paranthoën réalise Un petit chariot pour la Grande Ourse. À travers cette première création du célèbre preneur de son qui met en scène ses enfants, il propose consciemment une œuvre très osée pour la radio de l'époque : une émission faite uniquement avec des sons et des bribes de voix, sans interviews ni commentaires.
Depuis la naissance de notre fille, j'enregistre tous les sons qu'elle émet, que ce soit sa voix, ses gestes, ses cris... sans autre but – en tout cas au début – que de collecter ces moments privilégiés. Mais depuis que j'ai entendu cette œuvre de Yann Paranthoën, mes enregistrements ont pris une nouvelle dimension. Je me suis efforcé de trouver un point de vue, ou plutôt un point d'ouïe.
Sans prétendre me comparer au tailleur de son de l'Ile Grande, j’ai souhaité, cinquante ans plus tard, rendre hommage à cette pièce en réalisant à mon tour une création radiophonique qui reprend l'idée de mélanger des sons de jeux d'enfants avec ceux du monde adulte. En parallèle, s’est construit en fil rouge l'apprentissage du langage chez l'enfant, et sa découverte du monde à travers les sons.
J’ai imaginé une création sonore où les jeux d'enfant côtoieront les activités d'adultes. En mélangeant ces deux univers, j’ai essayé, un peu comme l'a fait Yann Paranthoën il y a cinquante ans, d’interroger la difficulté de préserver l'innocence de l'enfance face à la violence du monde des adultes. En entremêlant plusieurs pistes, j’ai voulu faire se rencontrer plusieurs mondes, plusieurs sens.
En plaçant mes micros à hauteur d'oreilles d'enfant, j'ai choisi de faire entendre ce que ma fille percevait du monde qui l'entoure. L'auditeur se retrouve en immersion. Comment un enfant reçoit-il les mots et les messages des adultes ? Comment saisit-il les sons de son environnement ? La pluie, le vent, les moteurs, les micros... tout devient sujet d'exploration, d'expérience.
Glenn Besnard
Glenn Besnard
Après des études d’audiovisuel, Glenn Besnard a débuté en 2004 comme opérateur du son pour les stations locales de Radio France. Il y a travaillé pendant 5 ans et a notamment écrit et réalisé une série documentaire de 10 épisodes de 10 minutes : De bouches à oreilles, les druides, diffusée sur France Bleu Armorique.
Il a ensuite posé ses micros sur scène et en studio en travaillant pour des formations musicales, en tant que musicien ou ingénieur du son (Bumpkin Island, Mariana Caetano, O Lake, Bel Air de Forro…). Il compose également pour le théâtre, la danse (compagnie Gazibul) ou pour le cinéma (Le bateau ivre, long métrage de Dominique Philippe).
En parallèle de ses activités dans le spectacle vivant et la musique, Glenn fait parfois des excursions dans la réalisation de documentaires audiovisuels. Il a co-réalisé avec Anne Burlot en 2016 son premier moyen métrage : Avec mes abeilles et écrit actuellement avec Anne un second moyen métrage.
Il réalise aussi des projets en solitaire avec ses micros. Avec une démarche documentaire, de collectage ou parfois poétique, il construit des pièces sonores diffusées à la radio ou lors de séances d’écoute en multi-diffusion.
Yann Paranthoën
Yann Paranthoën
Né en 1935 à l’Île Grande (Côtes d’Armor) et décédé en 2005, Yann Paranthoën est un documentariste sonore, opérateur du son à Radio France, de la RTF à France Inter et France Culture. Il est aujourd’hui régulièrement désigné comme un maître incontesté en la matière. Plusieurs de ses œuvres ont marqué le genre du documentaire radiophonique et de la création sonore : Questionnaire pour Lesconil, On Nagra, il enregistrera, et Lulu, entre autres.
15 mars 2021 18:55 - De saint albin
Merci