En sursis

Famille au champ - la terre et le temps

Seize hectares par jour, rien qu’en Bretagne ! 160 000 m2 de terres agricoles et naturelles bétonnées ou bitumées, chaque jour ! Comme si le sol n’était qu’un support technique utilisable à volonté.

Cela se passe principalement à la frontière entre ville et campagne, une frontière mouvante. La ville, par nature, s’étale. La loi SRU cherche à endiguer cette tendance depuis 1999, sans grand succès. Or les humains ont besoin de terres agricoles pour se nourrir, et besoin de zones naturelles pour conserver une biodiversité tout aussi essentielle à la vie sur Terre. À l’instar de ce qui se passe pour le réchauffement climatique, les enjeux sont parfaitement cernés, mais la collectivité reste impuissante à résoudre le problème.

Mathilde Mignon nous emmène en périphérie de Rennes, où des agriculteurs cultivent des terres en sursis, inscrites dans des zones à aménager dans un futur relativement proche. Cette menace s’ajoutant à toutes les autres difficultés des agriculteurs en général : une dévaluation de leur production et des contraintes réglementaires sans fin.

BANDE-ANNONCE

LA TERRE ET LE TEMPS

de Mathilde Mignon (2017)

Retrouvez ici la bande annonce de cette oeuvre (les droits de diffusion sur KuB sont arrivés à échéance).

Christian, Sylvie et Yvonnick, Étienne, Denis et Yvonne sont agriculteurs dans le bassin rennais. Autour d'eux, des lotissements sortent de terre, le métro s'approche. La ville s'avance et les terres agricoles s'amenuisent.
Tandis qu'un photographe invite ces paysans d'aujourd'hui à poser dans un décor intemporel, le film s'installe dans leur quotidien, le temps d'un été.

>>> un film produit par Gilles Padovani, .Mille et Une. Films

Primé au festival Caméra des Champs 2018

INTENTION

Ceux qui n'ont pas quitté la terre

par Mathilde Mignon

Plan aérien autour de Rennes - la terre et le temps
La terre et le temps - récolte du grain

Je pense que le cinéma documentaire se doit de faire écho aux questions de société. Or dans l'époque, très irrespectueuse de la nature, où nous vivons, les questions qui concernent l'environnement et l'alimentation, donc l'agriculture, me paraissent fondamentales. Et puis comme beaucoup de citadins, je viens d'une famille de paysans (à trois générations près) et m'engager avec ce film auprès de ceux qui n'ont pas quitté la terre, a fait sens pour moi.

L'impulsion de La terre et le temps m'a été donnée par le travail d'un photographe, Christian Raby, engagé dans un projet de livre avec des agriculteurs en France. Mon producteur est Rennais et la situation des agriculteurs en périphérie de Rennes m'a tout de suite parue complexe et intéressante.

Le film a été tourné à Thorigné-Fouillard et Acigné, à quinze minutes des portes de Rennes. J'ai suivi et accompagné Christian, Sylvie et Yvonnick, Étienne, Denis et Yvonne, éleveurs et cultivateurs aux abords de la ville. Autour d'eux, les lotissements sortent de terre et le métro s'approche. Le territoire est mouvant. La ville avance, pose des jalons, marque le temps et transforme les vies.

Comment ces agriculteurs font-ils face à cette situation ?


Eux dont les familles exploitent ces terres depuis des générations. Leurs réactions sont assez diverses. Ils adaptent leur travail, réorientent leurs activités. Ils savent trouver l'énergie en eux, la capacité de faire face ; leur combativité, l'amour qu'ils ont de leur métier, ainsi que l'attachement parfois viscéral qu'ils peuvent avoir pour leurs bêtes, sont exemplaires.

Pour autant, les projets de zones commerciales et artisanales ou de lotissements ne cessent de les impacter. Ils sont coincés entre la grande distribution, le pouvoir financier et des directives nationales et européennes, inscrits dans un vaste mouvement de société. Je sais comme eux que l'ardeur pour combattre un tel système n'est pas inépuisable. Quand l'on en regarde la situation en face, l’on voit que les terres agricoles s'amenuisent, et que les petites et moyennes exploitations disparaissent les unes après les autres. Christian, Sylvie et Yvonnick, Étienne, Denis et Yvonne sont des résistants, ils mènent un combat qui nous concerne tous.

Au final, ce film a été pour moi une manière d'interroger notre place sur une planète qu'on ne cesse d'abîmer ; cette place de l'homme surpuissant qu'il serait grand temps de remettre en question.

BIOGRAPHIE

MATHILDE MIGNON

Mathilde Mignon réalisatrice

Après des études de mathématiques, Mathilde Mignon réalise son premier court métrage, Le temps des corbeaux en 1986, (producteurs Cercle Bleu) puis entame des études de cinéma à l'INSAS à Bruxelles.
Dès son court métrage de fin d'études Sept alphabets pour une seule mer, sorti en 1993, primé dans divers festivals, elle s'engage dans le cinéma documentaire.
Elle a réalisé : Folles mémoires d’un caillou (1998, 59', prod. Les Films d’Ici), Une étoile et moi (2001, 58', prod. Lapsus), Dehors (2006, 59', prod. Lapsus), Femmes au charbon (2009, 58', prod. Mille et Une Films), La terre et le temps (2017, 54', prod. Mille et Une Films) primé au Festival international du film documentaire sur la ruralité Caméra des Champs 2018.

Elle enchaîne avec un portrait du musicien chanteur Sanseverino, cordes et âme, produit par Céline Loiseau, TS Production. Elle écrit également le scénario de Judith ou les démons, son premier long métrage de fiction, produit par Gilles Padovani, Mille et Une Films.

Depuis 2010, elle est responsable d’ateliers documentaires au sein de l’UFR de Cinéma à Paris 7 Diderot et en Hypokhâgne Lettres-Cinéma au lycée Paul Valéry, Paris 12e.

Elle est co-fondatrice de Questions de Regard, un collectif d'artistes impliqués dans des travaux artistiques collectifs, et y a co-réalisé des films courts, notamment avec des adolescents détenus.

REVUE DU WEB

Étalement urbain

France 3 Bretagne >>> l'urbanisation de la campagne en Bretagne.
En Bretagne 18 ha de terres agricoles disparaissent chaque jour… d’où la peur de voir des champs disparaître sous des maisons, des routes ou des supermarchés.

LE MONDE >>> Chaque jour, 160 hectares de terre ou de bois disparaissent en France au profit d'habitations, de zones commerciales ou industrielles et d'infrastructures de transport. Ce phénomène, commun à l'Occident, s'étend au détriment de l'agriculture et de l'environnement.

ARTE REGARDS >>> Quand la ville s'étend. Barbara est en colère contre les pouvoirs publics : Mon poulailler va être remplacé par une station de métro ? Et j’apprends ça en lisant les journaux ? Toutes les grandes villes d’Europe s’étendent au détriment des terres agricoles. De plus en plus de gens s’installent dans les métropoles. On s’y sent toujours plus à l’étroit, serrés les uns contre les autres. Selon les dernières prévisions, 300 000 personnes devraient ainsi s’installer à Munich d’ici 2030.

FRANCE INTER, CO2 mon amour >>> Prolifération des zones commerciales : jusqu’où va-t-on ? Un débat sur la profusion des centres commerciaux et leur impact sur les terres agricoles.

COMMENTAIRES

  • 2 décembre 2019 19:39 - JEAN-CLAUDE LE BORGNE

    Super film et terrible problématique.
    Est évoqué dans ce film la situation de fermiers par rapport aux propriétaires fonciers - en l'espèce, une noblesse terrienne. Avec des relations bailleurs/locataires de plus d'un siècle sur plusieurs générations. Ce serait peut-être intéressant de développer ce sujet, coté bailleurs ( très sollicités également par la pression foncière )
    Merci pour toutes vos productions ou diffusions.

CRÉDITS

réalisation Mathilde Mignon
image Mathilde Mignon et Philippe Crnogorac
son Mathilde Mignon et Vincent Pessogneaux

musique originale Bernard Blancan
montage Anne Weil et Sophie Brunet
mixage Fred Hamelin, Chuuttt !! Atelier sonore
conformation et étalonnage Frédéric Fleureau, Ouest-Editing

production .Mille et Une. Films
coproduction TVR, Tébéo, TébéSud avec le soutien de la Région Bretagne
avec l’aide du CNC, du Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, de la Procirep, Angoa

lieux de tournage Acigné, Thorigné-Fouillard

Artistes cités sur cette page

Mathilde Mignon réalisatrice

Mathilde Mignon

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